« Il est toujours le plus grand, il a tout anticipé... » Edgar Degas, à propos de Corot.
Nombreux furent les grands peintres dont nous pouvons dire rétrospectivement qu’après eux nos figurations du monde ont été profondément bouleversées. Il y eut Giotto, qui le premier représenta l’illusion de la troisième dimension dans l’espace bidimensionnel du tableau. Puis, par exemple, Goya et sa peinture pré-romantique du sentiment. Puis différemment Corot, qui s’illustra à son tour en se détournant progressivement des classiques afin de composer une peinture réaliste, et de représenter le monde tel qu’il est vu.
Cette bascule entre regard « classique » et vision « réaliste » de la nature, entre un « avant » et un « après » Corot, la Galerie Frémeaux l’illustre aujourd’hui en présentant une toile composée dans le style du grand maître du paysage français (Jeunes Bergères et leur troupeau dans la Forêt), le « Père Corot » comme on le nommait alors, et, en soumettant à l’oeil du visiteur des oeuvres de ces prédécesseurs et de ses successeurs. Des peintres « classiques » d’une part, à la touche fondue et à la ligne claire, dont les paysages ont été (re)composés en atelier d’après des études et des esquisses préparatoires (Wouwermann [d’après], Ecole française des XVIIIe et XIXe siècles, Ecole des Alpes...). Et d’autre part, des artistes « réalistes » (Comble, Rouvière, Cabié...) ou « impressionnistes » (Boisgontier, Bogatyrev...), au style matiéré, profond et mouvementé dont les toiles ont été composées en plein air, sur le motif. Une démarche illustrée par l’œuvre de Jean-Baptiste Brunel, En quête du futur paysage.
Un choix d’accrochage qui laisse ouverte un question qui taraude les historiens de l’art depuis le début du XXe siècle, et qui n’a toujours pas trouvée de réponse : Corot, dernier néo-classique ou premier impressionniste ?